L'Hebdo #148:  Vers une nouvelle crise de la dette souveraine en France et une exonération fiscale temporaire à saisir

📈 Les news qui ont fait bouger les marchés cette semaine

1. La Fed sur le point de baisser ses taux

Aux États-Unis, toute l’attention s’est tournée vers la Réserve fédérale. Les statistiques publiées ces derniers jours (emploi en repli, inflation en ligne avec les attentes) ont renforcé l’idée que la banque centrale américaine abaissera son taux directeur la semaine prochaine. Les investisseurs tablent à plus de 90 % sur une baisse de 25 points de base, une minorité misant sur 50 points.
Cet espoir d’un assouplissement monétaire agit comme un véritable carburant pour Wall Street : le S&P 500 et le Nasdaq ont multiplié les records, portés par l’idée d’un crédit plus accessible et d’un soutien renforcé à la croissance. Les rendements obligataires ont légèrement reflué, confirmant cette anticipation. Ce scénario a aussi un effet psychologique puissant : il détourne l’attention des tensions politiques et des signaux de ralentissement économique, pour replacer la Fed au centre du jeu. En clair, tant que la banque centrale alimente l’optimisme, les marchés suivent.

 

2. Oracle, nouvel acteur phare de l’IA

Si un titre a retenu toutes les attentions cette semaine, c’est bien Oracle. L’entreprise, longtemps perçue comme un acteur traditionnel du logiciel, a dévoilé des résultats spectaculaires : son carnet de commandes a bondi de 360 %, notamment grâce à des contrats massifs liés à la location de serveurs cloud destinés à l’intelligence artificielle. Résultat, l’action s’est envolée de plus de 25 % et la capitalisation du groupe a gagné plus de 200 milliards de dollars en quelques séances, propulsant Oracle dans le cercle restreint des mastodontes technologiques.
Cet épisode illustre deux tendances majeures : d’une part, l’IA reste un moteur incontournable de valorisation, qui peut transformer des entreprises déjà établies en champions de croissance ; d’autre part, le marché vit dans une logique de “FOMO” (fear of missing out). Les investisseurs préfèrent se surexposer aux gagnants de l’IA plutôt que de risquer de passer à côté de la prochaine vague technologique. Oracle devient ainsi un symbole : même un “dinosaure” de la tech peut se réinventer et créer un choc boursier d’ampleur mondiale.

 

3. Instabilité politique en France, calme relatif sur les marchés

En Europe, c’est la politique française qui a animé la semaine. Le gouvernement de François Bayrou a chuté après un vote de défiance, plongeant de nouveau le pays dans l’incertitude budgétaire. À court terme, cette instabilité pourrait se traduire par une prime de risque plus élevée pour la dette française et donc par un renchérissement du coût d’emprunt pour l’État. La note souveraine française a été abaissée vendredi soir par l'agence de notation Fitch. Elle est passée de AA- à A+, avec perspective stable. La France se voit sanctionnée pour son instabilité politique persistante, couplée à des incertitudes budgétaires qui contrarient l'assainissement des comptes publics très dégradés. Si une baisse de note n'est jamais une bonne nouvelle, la France ne figure pas parmi les plus mauvais élèves d'Europe. La comparaison avec l’Italie ou l’Allemagne rappelle combien les marges de manœuvre sont réduites dans un contexte de finances publiques fragiles. Pour autant, les marchés financiers ont réagi avec une relative sérénité. Le CAC 40 a même progressé dans la foulée, preuve que la chute du gouvernement était largement anticipée et que les investisseurs estiment que l’essentiel se joue ailleurs, en particulier aux États-Unis. Cette déconnexion entre la sphère politique et la sphère boursière montre bien que, tant que les taux restent bas ou en voie de l’être, les marchés préfèrent ignorer les remous nationaux. En revanche, à moyen terme, une accumulation de crises politiques pourrait peser sur la crédibilité budgétaire française et raviver les inquiétudes sur la soutenabilité de la dette.

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📰 Le dossier de la semaine : Vers une nouvelle crise de la dette souveraine en France ?

La question revient avec insistance : la France pourrait-elle connaître une crise de la dette comparable à celle de la Grèce en 2010 ? Les signaux d’alerte se multiplient. Déficits publics persistants, dette qui enfle inexorablement, blocages politiques répétés… autant d’éléments qui nourrissent l’inquiétude des investisseurs et fragilisent la confiance dans l’économie française.

 

Une trajectoire budgétaire inquiétante

Selon les projections du Fonds monétaire international, la France devrait maintenir un déficit public proche de 6 % du PIB dans les années à venir. À ce rythme, la dette publique atteindrait 128 % du PIB d’ici 2030, un niveau similaire à celui observé en Grèce à la veille de sa crise. Les marchés ne s’y trompent pas : les taux exigés par les investisseurs sur les obligations françaises se rapprochent de ceux de l’Italie, pays déjà lourdement endetté.

Cette situation est d’autant plus préoccupante que la France dispose d’un État particulièrement dépensier. Avec des dépenses publiques représentant 57 % du PIB, et des recettes fiscales déjà très élevées (51 % du PIB), la marge de manœuvre est extrêmement réduite. Le levier de l’impôt étant quasiment saturé, la seule voie réaliste pour redresser les comptes publics passe par des coupes budgétaires massives, notamment sur les dépenses sociales et les retraites.

 

Un blocage politique persistant

Sur le plan politique, la perspective de telles réformes semble très compromise. Depuis deux ans, plusieurs Premiers ministres se sont succédé, incapables de faire voter un budget d’austérité. Les forces dominantes à l’Assemblée nationale – entre extrême gauche et extrême droite – rejettent fermement toute réduction significative des dépenses publiques.

Le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, proche d’Emmanuel Macron, hérite donc d’une mission quasiment impossible : ramener le déficit sur une trajectoire soutenable sans déclencher une crise sociale et politique majeure. Et les élections anticipées, régulièrement évoquées, n’apporteraient pas de majorité claire permettant de trancher dans le vif.

 

Une économie fragilisée par des vents contraires

Au-delà du politique, le contexte économique complique encore la donne. La croissance reste faible et menacée par plusieurs facteurs :

un euro fort, qui pénalise la compétitivité des exportations françaises ;

les tarifs douaniers punitifs imposés par les États-Unis, qui freinent les débouchés extérieurs ;

une consommation intérieure fragilisée par le ralentissement économique.

Dans ce cadre, la mise en œuvre de mesures d’austérité risquerait d’accentuer le risque de récession, faute de pouvoir s’appuyer sur une politique monétaire ou un ajustement par la dévaluation.

 

L’ombre d’une crise systémique

Une éventuelle crise de la dette en France dépasserait largement ses frontières. La Grèce avait, en son temps, provoqué des secousses majeures sur les marchés mondiaux. Mais la France, deuxième économie de la zone euro, représenterait un défi autrement plus considérable. Un tel scénario pourrait réveiller l’attention des marchés sur l’endettement américain et déclencher une phase de turbulence mondiale prolongée.

 

Le rôle crucial de la Banque centrale européenne

Toutefois, une différence majeure avec 2010 réside dans la capacité actuelle de la Banque centrale européenne à intervenir. Depuis la crise grecque, l’arsenal de la BCE s’est considérablement renforcé. Elle dispose désormais d’outils lui permettant de soutenir un pays en difficulté afin d’éviter une contagion fatale à l’ensemble de la zone euro.

Mais cette aide ne serait pas sans contreparties. Comme le FMI en son temps, la BCE exigerait très probablement des réformes budgétaires strictes en échange de son soutien. Or, tout laisse à penser que la classe politique française repoussera le moment de vérité aussi longtemps que possible, jusqu’à ce que les marchés forcent la décision en déclenchant une hausse brutale des taux d’emprunt.

 

Conclusion : un sauvetage probable, mais au prix d’une forte volatilité

En définitive, il est hautement probable que la BCE interviendra pour éviter l’implosion de la zone euro. Mais avant ce dénouement, les marchés risquent de traverser une phase de forte instabilité, avec des conséquences pour l’ensemble de l’économie mondiale.

La situation française illustre une vérité souvent répétée mais rarement entendue : en matière de dette publique, ignorer les signaux d’alerte finit toujours par coûter plus cher. La survie de l’euro pourrait bien, une fois de plus, se jouer à Paris.

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🏠 Immobilier : Dons familiaux d’argent : une exonération fiscale temporaire à saisir

Transmettre une partie de son patrimoine à ses enfants ou petits-enfants sans alourdir la facture fiscale est désormais plus simple. Depuis la loi de finances 2025, un dispositif temporaire permet d’effectuer des dons familiaux d’argent exonérés de droits de mutation. L’objectif affiché par l’État : stimuler la construction de logements neufs et encourager la rénovation énergétique. Mais derrière cette opportunité se cachent des règles précises à respecter.

 

Un dispositif fiscal exceptionnel pour la transmission familiale

Traditionnellement, les donations sont soumises aux droits de mutation à titre gratuit (DMTG), dont le montant varie selon le lien de parenté entre le donateur et le bénéficiaire. Pour alléger ce coût, l’État a instauré une exonération spécifique applicable aux dons familiaux d’argent réalisés entre le 15 février 2025 et le 31 décembre 2026.

Concrètement, un parent, grand-parent ou arrière-grand-parent peut donner jusqu’à 100.000 euros par bénéficiaire, dans la limite de 300.000 euros par donataire, sans taxation. Une condition essentielle : les fonds reçus doivent être utilisés rapidement, soit pour acquérir un logement neuf ou en état futur d’achèvement (Vefa), soit pour financer des travaux de rénovation énergétique dans la résidence principale du bénéficiaire.

 

Des précisions bienvenues pour sécuriser les donations

Pendant plusieurs mois, les praticiens (notaires, conseillers patrimoniaux) se sont heurtés à des zones d’ombre. Fallait-il signer l’acte de vente d’un logement dans les six mois ? Les achats en indivision ou en usufruit étaient-ils autorisés ? La publication récente de l’instruction fiscale dans le Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) est venue clarifier le champ d’application.

  • Délai de six mois : pour un logement en Vefa, il court à partir de la signature de l’acte authentique et non de la réservation. Le bénéficiaire peut donc échelonner ses paiements sur plusieurs mois ou années selon l’échéancier prévu.

  • Indivision et usufruit : l’administration accepte que les fonds servent à un achat en indivision ou à l’acquisition d’un usufruit, à condition que le bien soit utilisé comme résidence principale ou loué à titre de résidence principale.

  • Exclusions : l’achat d’un terrain à bâtir, la construction d’un logement par le donataire ou l’acquisition via une société civile immobilière (SCI) restent exclus du dispositif. De même, les résidences services (étudiantes, seniors, handicapés) n’ouvrent pas droit à l’exonération.

 

Rénovation énergétique : un cadre strict

Pour le volet rénovation, l’administration a restreint l’exonération aux travaux éligibles à MaPrimeRénov’, et uniquement lorsqu’ils sont réalisés par des professionnels qualifiés. Attention : le bénéficiaire ne peut pas cumuler la prime publique et l’exonération fiscale sur les mêmes dépenses. Autre précision, les travaux doivent concerner la résidence principale du donataire située en France, qu’il s’engage à occuper pendant au moins cinq ans.

 

Une opportunité fiscale à encadrer

Ce dispositif s’inscrit dans une logique de double incitation :

  • aider les jeunes générations à accéder à la propriété,

  • accélérer la transition énergétique du parc immobilier.

Mais son efficacité dépendra de la bonne compréhension des règles par les familles. En cas de non-respect des conditions (par exemple, si l’argent est détourné de son usage prévu), le donataire devra rembourser les droits initialement exonérés, assortis d’intérêts de retard.

 

Cette exonération temporaire des dons familiaux représente une opportunité rare d’optimiser sa transmission tout en soutenant l’immobilier et la rénovation énergétique. Mais elle exige une application rigoureuse des critères fixés par l’administration.

Un accompagnement par un notaire ou un conseiller en gestion de patrimoine permet d’éviter les erreurs et d’intégrer ce levier dans une stratégie patrimoniale plus large. Bien utilisée, cette mesure peut alléger la facture fiscale, fluidifier les transmissions et renforcer le patrimoine immobilier des jeunes générations.

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💸 Les annonces d’entreprises à noter de la semaine :

  • Alstom remporte un contrat de 538 millions d'euros en Nouvelle-Zélande pour 18 trains à batterie et 35 ans de maintenance.

 

  • The Blockchain Group lève 5 MEUR additionnels pour acheter des bitcoins.

 

  • ASML va devenir le principal actionnaire de la start-up française d'Intelligence artificielle Mistral AI.

 

  • L'UE sanctionne Google à hauteur de 3 MdsEUR pour ses pratiques publicitaires.

 

  • Renault prévoit d'accélérer sa transformation face à la concurrence chinoise, selon son PDG

 

  • Thales lance un service de télécommunications par satellite pour le CNES.

 

  • Banca Monte Dei Paschi devient la 3e banque italienne en parvenant à contrôler plus de 50% de Mediobanca après son OPA hostile.

 

  • Le CEO de Zhejiang Leapmotor prévoit que les ventes mondiales du constructeur atteindront 1 million en 2026.

 

  • Les salariés du Parisien exhortent LVMH à ne pas céder le titre à Vincent Bolloré.

 

  • Microsoft se tournerait vers l'IA Anthropic pour réduire sa dépendance à OpenAI, selon The Information.

 

  • Apple lance ses iPhone 17 et un modèle ultrafin, sans révolution IA.

 

  • Valentino ne changera pas de mains avant au moins 2028, dit Kering.

 

  • Stellantis vend son activité de fabrication de moteurs diesel italiens VM Motori.

 

  • Carrefour entre au capital d'une enseigne spécialisée dans l'alimentation halal, Hmarket.

 

  • Klarna a bondit pour sa première cotation à New York, mercredi.

 

  • OpenAI va acheter de la puissance de calcul à Oracle au terme d'un contrat de 300 milliards de dollars, selon le WSJ.

 

  • Euronext remplace Teleperformance dans le CAC 40.

 

  • Les actions d'Alibaba flambent après que l'entreprise a lancé une série de mesures destinées à consolider sa place dans le boom du développement de l'IA en Chine.

 

  • Toyota Motor rappelle 591 000 véhicules Toyota et Lexus aux Etats-Unis en raison d'un défaut d'affichage du tableau de bord.

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Source : Les Echos, Investir, Investing, ZoneBourse, Reuters, ABC Bourse

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